mardi 25 novembre 2008

Une naine, une vieille, un jeune homme

Je suis là, sur le quai B, à attendre le train de 15h22. Je suis en avance. Je regarde machinalement sur les rails devant moi et m'en approche le plus possible pour regarder dans ce renfoncement. Je suis choqué d'apercevoir un amas de mégots. Ils sont empilés les uns sur les autre, de façon aléatoire. Mais en regardant globalement, ces déchets décrivent une grande ligne jaune et blanche parallèle au quai. A cet instant, je me retourne vers une petite dame, la trentaine, qui enfume son entourage. Je l'espionne. Il ne lui reste plus que quelques bouffées de nicotines. J'attends avec impatience cette dernière inspiration et je l'observe plus attentivement. J'attends le geste qu'elle fera. Je me suis jeté sur elle, car c'était la première dans mon champ de vision, mais je suis sur que j'aurai pu avoir d'autres choix. Elle prend cette cigarette et la retire de sa bouche . Elle ne choisira pas de la jeter sur les rails, non, elle préférera la jeter au sol et de l'écraser par deux coups de va et vient avec sa chaussure (de pointure 38). Je tourne ma tête tout autour de moi. Juste devant mes yeux, à 3m de nous, je vois ce cendrier. Un grand et gros cendrier avec une immense inscription au dessus de lui, incitant à la propreté de la gare. Je refixe cette demoiselle (ou dame), et lui lance :"Excusez moi, je crois que vous 'n'avez pas vue le cendrier derrière vous?". Non, je n'ai pas eu le courage. Je ne sais pas et ne saurai pas si elle m'aurait écouter ou plutôt si elle m'aurait jeter un "Connard, qu'est ce que ça peut te foutre?".


Je rentre dans le wagon puis je choisis un compartiment où il reste plusieurs places assises. Je lance un timide bonjour que personne ne relèvera. Je me console en me disant que la vieille contre la vitre ne m'a pas entendu, tout comme ce jeune homme, qui est trop occupé avec ses écouteurs sur ses oreilles. Viendront également nous tenir compagnie, un couple de randonneurs, assez souriants, qui s'assoient en face de la vieille. Son visage dur, sec, sans expression de douceur, sans le moindre sourire, sans le moindre contacts me glace. A coté d'elle, une mamie au broching parfait vient s'installer tranquillement. Elle apporte avec elle une grosse valise, que le jeune homme lui proposera gentillment de monter au porte bagage. Cette mamie m'a l'air chaleureuse, conviviale, à l'opposée de sa voisine. A ma droite, une charmante demoiselle ne fera que textoter durant le voyage et tenter de trouver un pseudo sommeil. Il reste une place vide devant moi. Ceci me permet d'étendre mes jambes (je suis sur que le grand jeune home doit m'envier). Je n'aime pas les wagons avec des compartiments, car nous n'avons pas beaucoup d'intimité. Est ce que ceci est censé favoriser une communication? De plus, je suis sur qu'il tient moins de places assises dans un wagon à compartiments que dans une voiture avec seulement des sièges.

Mamie lit Femme actuelle. Quant à moi, je regrette de ne pas avoir pris de lecture. J'écoute de la musique et écris ces quelques lignes sur un bloc note improvisé. Pourquoi la vieille tire t-elle cette tronche? Son mari est peut être décédé, ou alors elle n'en a jamais connu, ou bien alors elle est peut être atteinte d'une maladie grave, ou alors ... Beaucoup de raisons, mais cette vieille souffre depuis très très longtemps, car son visage n'inspire vraiment pas la joie de vivre. Le paysage défile : des prés, des arbres tout nus, des champs, encore des prés, ... Lorsque nous nous arrêtons dans les gares, il règne un silence!!! Seule la musique du jeune homme le rompt, à tel point que sa musique couvre la mienne. Il écoute du hard rock et bat le rythme avec son pied.

C'est amusant de se retrouver avec 6 inconnus, assis pendant quelques heures. Combien de temps faudra t il pour que quelqu'un tente de rompre ce silence? Si nous étions enfermés tous les 7 pendants 24h, qui parlerait le premier? Et pour quoi dire? Mamie fait ses mots fléchés. La vieille part pour discuter au téléphone. Et moi je descend du train, le voyage est terminé.

3 commentaires:

Calyste a dit…

J'aime beaucoup les voyages en train. C'est toujours l'occasion de bonnes observations. Lyon-Guéret, chaque été: cinq heures. Je fais comme toi: j'observe et je note, sur de petites feuilles que je tape ensuite ensuite ici. L'humanité en prend un coup, c'est sûr. Mais mieux vaut des voisins muets que l'inverse: les envahissants qui te gâchent ton voyage en n'arrêtant pas une seconde de parler, quand ils (elles) ne te montrent pas les photos du petit-fils qui vient de naître.
Un compliment de prof (!): tu écris de mieux en mieux.
Bises, R.

S. a dit…

Merci pour ce compliment, ceci me touche en venant de ta part. Mais je crois que tu ne dois pas toujours aprécier mes concordances de temps... (je pense à toi parfois, par rapport à ta remarque sur ce sujet, l'autre soir chez Jacques)
Et pour ce qui est des voyageurs, je te confirme que les muets sont parfois bcp plus agréables ;-)
Bises à toi,
S.

Anonyme a dit…

pas facile de se parler, chacun reste avec ses pensées alors on peut imaginer !